Analyse de Poeme - Correspondances, Charles Baudelaire

Mon exposé portera sur Correspondances, poème très important dans l’esthétique symboliste et baudelairienne, publié dans Les Fleurs du Mal en 1857.

Le thème central du poème est évidemment celui des correspondances, comme le titre lui-même le suggère. Le terme correspondances est fréquemment employé par les mystiques pour désigner l’analogie existant entre différents règnes de la nature. Ainsi pour eux, le règne végétal et le règne animal, dont fait partie l’homme, participent d’une vie identique et sont tous deux l’incarnation d’une réalité spirituelle. La théorie de l’analogie ou des correspondances n’était pas neuve chez Baudelaire. Il avoue lui-même l’avait tirée de Swedenborg, un philosophe suédois du XVIII-ème siècle :

«D’ailleurs Swedenborg nous avait déjà enseigné que tout, forme,mouvement, nombre, couleurs, parfums, dans le spirituel comme dans le naturel, est significatif, réciproque, converse, correspondant Or qu’est-ce que un poète si ce n’est pas un traducteur, un déchiffreur?»(L’Art romantique)

Ce mot désigne le principe de l’analogie universelle. Il apparaît chez Platon pour qui les réalités sensibles, matérielles, ne sont que le reflet des idées, c’est-à-dire d’un monde spirituel.

On a affaire à un poème didactique. Le poète livre une méthode - celle de la synesthésie c’est-à-dire celle des équivalences sensorielles. Cette recherche apportera dans le texte un grand nombre de comparaisons.

Baudelaire utilise la structure du sonnet : deux quatrains qui constituent le temps théorique et deux tercets qui livrent le développement d’équivalence. Ce sonnet présente une progression logique: la théorie des correspondances est énoncée au premier quatrain, détaillée au deuxième quatrain et illustrée dans les tercets. La profonde harmonie du sonnet est rendue par les alexandrins, tous coupés en deux hémistiches identiques (6-6), une exception faisant le vers 8 : « Les parfums, les couleurs et les sons se répondent » et par la rime embrassée.

Correspondances est un dialogue entre l’homme et la nature. Dans la relation homme - nature qui est génératrice des phénomènes d’analogie le poète apparaît comme un médiateur.

Dominique Rincé dans sa célèbre étude sur Baudelaire avait distingué dans tout le système des correspondances deux axes, horizontale et verticale, d’où sont issues les correspondances horizontales et les correspondances verticales.

« Les correspondances horizontales qu’on porterait « en abscisse » du discours sont les plus simples et les plus évidentes. Elles consistent en un rapprochement, sur l’axe linéaire de la phrase ou du vers, au fil des figures telles la comparaison ou la métaphore, d’éléments (objets, décors, sensations, etc.) apparemment éloignés que nous sommes conviés à imaginer dans leur analogie et leur unité fondamentale. »

Le meilleur exemple est celui des synesthésies : « Les parfums, les couleurs et les sons se répondent » (v.8) , que Baudelaire définissait dans un article de1861 : « Ce qui serait vraiment surprenant, c’est que le son ne peut pas suggérer la couleur, que les couleurs ne pussent pas donner l’idée d’une mélodie, et que le son et la couleur fussent impropres à traduire les idées ; les choses s’étant toujours exprimées par une analogie réciproque, depuis le jour ou Dieu a proféré le monde comme une complexe et indivisible totalité ».